De retour au Népal en 2018
En 2017, dans le cadre d'une course: l'Annapurna Mandala Trail (AMT), nous avions foulé les sentiers et les pistes du Mustang, ancien royaume interdit, en nous promettant de revenir; ce pays et ses habitants sont tellement attachants.
C'est sur la région du Khumbu, du nom du glacier qui descend de l'Everest, que nous avons jeté notre dévolu, cette année; Sophie, Marko et moi.
Contrairement au Mustang qui est, chaque année, saigné par de nouvelles pistes, de par sa situation le Khumbu n'est accessible depuis Katmandou, que par avion jusqu'à Lukla ou après une journée de bus jusqu'à Jiri et 2 de marche pour Lukla. Aucun véhicule à moteur, terrestre, ne permet de se rendre au pied du toit du monde. Seuls les hélicoptères assurent les évacuations en cas d'accident lors d'escalades ou de problèmes médicaux (essentiellement liés au mal aigu des montagnes).
Pour visiter ou parcourir en courant le Mustang, il est nécessaire de posséder un permis de treck très onéreux (500 dollars avant 2015 et 100 actuellement), l'entrée au Khumbu est plus accessible (50 dollars). En revanche, la situation de cette région qui concentre la majorité des plus hauts sommets du monde attire un public, chaque année plus nombreux... à tel point que la portion "inévitable", de Lukla (aéroport et/où arrivent les treckers partis à pied de Jiri) à Namché Bazar, est très très encombrée, entre treckers, porteurs chargés de fardeaux inimaginables (parfois jusqu'à 90 kg) et convois d'animaux (vaches ou yacks) transportant tout ce qui est nécessaire à la vie de la région (bouteilles de gaz et tous les autres ravitaillements, car au delà de 3000 à 4000 m d'altitude il n'y a aucune denrée qui n'ait été apportée à la sueur d'un front)...
Entre Lukla et Namché, il y a au moins 100 lodges. En saison, 100 trekkeurs tombent du ciel chaque jour et c'est 100 tonnes de nourriture qui circulent sur ce chemin!
Nous sommes arrivés à Katmandou le samedi 20 octobre.
Après bien des péripéties (2h30) pour obtenir les visas népalais, on se rend aux bureaux de Base Camp (une des plus importante et qui plus est francophone agence de treck de Katmandou) pour récupérer les billets d'avion pour Lukla et le solde de ce qui m'était remboursé sur 2017 (pour avoir médicalisé l'AMT). Puis on traine un peu dans Thamel, un des quartiers très commerçant de Katmandou, on fait du change (il faut compter 20 euros environ par jour de treck lors du périple pour dormir et se sustenter x 15 jours...).
Après une nuit passée dans le même hôtel qu'en 2017 après la course au Mustang, le Yellow House, nous empruntons un taxi pour nous rendre à l'aéroport chargés de nos seuls sacs de treck, soit environ 10 kg pour chacun d'entre nous. Nous laissons le reste de nos affaires à la bagagerie de l'hôtel.
Donc, levés tôt le dimanche matin, nous arrivons à 7h dans la partie de l'aéroport réservée aux vols domestiques. Notre vol est prévu à 9h. Après avoir bataillé avec les représentants des agences qui nous passent devant le nez et enregistrent pour 8 et parfois 15 personnes, nous réussissons à obtenir nos précieux bording pass vers 9h30! Nous n'étions pas au bout de nos surprises... en effet, notre avion affiché sans précision sur l'heure de décollage disparait brutalement du tableau des départs pour Lukla... On interroge les représentants de la compagnie. Ces derniers ne nous donnent aucune précision. Il faut "attendre". Vers 14h, au milieu d'un brouhaha indescriptible et d'une grande salle bondée, un agent de la compagnie scande le numéro de notre vol dans un anglais approximatif. On embarque dans un avion de 14 places, probablement affrété par Base Camp; l'aéroport de Lukla possède en effet une seule piste très courte, inclinée de 20°, permettant l'atterrissage de très peu de type d'appareils... (atterrissage en montée et décollage en descente!!!). J'entendrai une fois cette plaisanterie: "atterrir à Lukla, c'est comme se garer dans son parking à 100km/heure"! Le vol dure 1/2h. Nous récupérons le matériel mis en soute car non autorisé en cabine pour des raisons de sécurité (bâtons de marche, crampons pour le passage de glacier, couteaux...). Puis nous nous mettons en marche.
Initialement, de Lukla (2840m d'altitude) nous pensions aller jusqu'à Monjo (2835m), mais compte tenu du retard pris, on ira jusqu'à Phakding (2610 m) avant que la nuit nous surprenne. Soit 8.5kms de chemin très emprunté, en 2h10 et en parcourant 200m de dénivelé positif (D+) et 400m de dénivelé négatif (D-) sous un ciel couvert mais sans précipitations. On se présente à la porte d'un lodge, comme il y en a beaucoup dans le Khumbu. On prend une chambre pour 3. Il y fait froid et humide. Sophie est la première à vouloir prendre une douche. Le chauffe eau à gaz lui délivre de la vapeur brûlante (elle n'a pas ouvert le robinet d'arrivée de l'eau au chauffe eau!). Pour moi, ce sera la dernière douche chaude avant longtemps! Pour éviter de mettre des vêtements froids et humides le matin, comme nous aurons à le faire tous les soirs, on place nos affaires entre matelas et sommier pour la nuit.
Après une bonne nuit et un réveil à 6h30 et un petit déjeuner fait de 2 toasts, de la confiture et un café noir, on se met en marche vers 8h. On espère rallier Thamé (3820m)dans la journée. Le soleil ne donne pas encore sur notre chemin. Aussi, très rapidement, malgré les 2 paires de gants, j'ai l'onglée... Dès ce moment là, je sais que je ne pourrai pas aller au Kala Pathar (5550m) comme ça! Aussi, en traversant Namché Bazar, j'achète des moufles comme celles que possèdent les alpinistes, énormes et chauds. Ce qui nous casse les pattes entre Phakding et Namché, c'est le monde qui monte ou descend par cet unique chemin (animaux chargés ou non, trekkeurs , guides et porteurs).
D'autant que le sentier parfois pavé, parfois glissant, parfois très étroit est souvent accidenté avec alternances de montées et de descentes (marches d'escalier ou traversées de torrents par des ponts suspendus où il est difficile de croiser les convois d'animaux...). Qui plus est, après être sorti du fond de la vallée, on se retrouve sous un soleil de plomb, obligeant à se dévêtir en passant de 3 couches (sweat thermique+ polaire+doudoune) à un simple tee-shirt. Après Monjo (2835m), on passe à Namché (3440m) porte d'entrée et principale bourgade du Khumbu, puis Thamo (3440m). Mais on est monté très (trop!) vite... aussi, on décide de stopper à Samdé (3610m). On est cuit, la fraicheur tombe très vite, car le soleil est caché par les nuages d'altitude qui bourgeonnent et bourgeonneront quotidiennement vers 14h30-15h. Aujourd'hui, nous avons fait 23.5kms en 6h40 avec 1450m de D+ et 450 de D-. Le lodge est beaucoup plus rustique que celui de la veille. On commence par prendre un thé au massala pour se réchauffer puis on prend possession de nos chambres (pas de chambres à 3 lits ici), dans un bâtiment à l'écart de la salle chauffée à la bouse de yach séchée, pour le dîner seulement. Pas de douche du tout, mais une bassine au pied d'un robinet à l'extérieur, à coté de WC turques. Notre dîner se composera pour Sophie et moi de nouilles avec omelette et pour Marko, d'un Dal Bat. Nous nous couchons tôt (19h). Au petit matin, après le petit déjeuner(6h30), dans une salle glaciale, nous avons la surprise de ne pouvoir nous servir de l'eau à l'extérieur car tout est gelé! On se rabat donc sur les lingettes pour une toilette sommaire...
A 7h45, le 23 octobre, on se met en route pour Lungren (4380m), charmant petit village composé de maisons en pierre, disposées en carré, entourées de murets en pierres sèches qui abritent des champs de pommes de terre; via Thamé. Arrivés vers midi, après 13.5kms en 3h30 avec 850m de D+ et 200 de D-, on s'arrête au premier lodge que l'on rencontre. Les toilettes sont à l'intérieur. En revanche, pas de douche possible. On lave donc l'essentiel, à l'eau froide, au dessus du WC à la turque... et comme la journée n'est pas trop avancée, on lave un peu de linge de corps que l'on met à sécher dehors, au vent car le soleil est déjà masqué par les nuages. On est entourés de très hautes montagnes, dont les sommets sont couverts de neige. Demain, il nous faudra passer le 1er col de notre périple: le Renjo La à 5360m pour, ensuite, arriver à Gokyo (4790m). A l'altitude de Lungren, les arbres ont disparu et les petits ruisseaux ne dégèlent pas de la journée. On ressent le froid dès que l'on s'arrête de marcher. Le souffle est court; d'autant que l'on est monté très (trop vite)... on est passé en 48h de 1600m à Katmandou à 4380m alors qu'en théorie, on ne devrait pas gagner plus de 5 à 600m d'altitude par jour. On le paiera cash le lendemain; surtout Sophie qui finira l'ascension du Renjo La épuisée, alors que Marko qui venait au Khumbu pour la 3ème fois nous avait assuré que ce col se montait "les doigts dans le nez! Notre chance, aujourd'hui, a été d'avoir le vent d'est dans le dos. Il n'en sera pas de même demain pour grimper au col. Au diner, nous prenons tous les 3 le plat national, dont la base est composée de riz et de lentilles dans leur jus de cuisson. Puis nous nous couchons dans une chambre triple vers 20h.
Réveil le 24 à 6h15 pour un départ à 7h30 après un petit déjeuner pour Marko et moi et un simple café noir pour Sophie qui se sent déjà barbouillée sur le plan digestif. Au sortir du lodge, le vent est glacial et le soleil pas encore levé. On a pas fait 500m que je ne peux plus avancer sans d'atroces douleurs aux doigts malgré 2 paires de gants (je me servais des énormes gants achetés à Namché pour soulager mes épaules du poids du sac...). Précautionneusement, Marko enlève mes gants, j'en suis incapable, et m'aide à passer les grosses moufles sur mes gants de soie; ça va tout de suite mieux, d'autant que le soleil se lève peu après.
L'ascension du Renjo devient vite un calvaire pour Sophie que nous tentons d'aider en la soulageant de temps à autre de son sac. Après quelques photos au col, on descend sur Gokyo, dans un paysage de rêve. Devant nous, en contrebas, on a ce village dans lequel on va s'arrêter, un lac magnifique (lac le plus élevé du monde) et en toile de fond sa majesté l'Everest (8848m) et le Lhotse (8516m)... de quoi faire oublier à chacun les affres de la montée!
La descente est un plaisir pour Sophie qui se refait très vite, alors que c'est, comme toujours quand c'est raide, un calvaire pour moi; d'autant que le sentier constitué de sable et de galets ronds est très glissant. Qui plus est, je sens que je n'ai pas assez mangé et que l'hypo me guette. J'appréhende la chute tant sur l'épaule gauche opérée en mars de cette année que sur la fesse droite blessée à un ischio jambier en juillet dernier... je ne tomberai qu'une seule fois sur les fesses sans bobo cependant. Ce qui est pénible, en descente, c'est que l'on ne peut lever les yeux pour admirer le paysage. On est contraint, en permanence de regarder ses pieds... On aura fait 13 kms en 6h30 avec 1050 de D+ et 650 de D-. Il est 14h quand nous arrivons. C'est là que, bien que prévenus à l'avance, nous nous rendons compte du coût de la vie pour les treckers, à ces altitudes. Une douche chaude est tarifée 700 roupies, la recharge d'un seul appareil 800 roupies, le Wifi limité à la vallée 900 roupies... Alors, comme hier, ce sera toilette à l'arrache, à la lingette, en insistant sur l'essentiel. Le soleil tape sur les carreaux de la salle de restaurant où nous nous installons, le dos aux vitres pour manger.
On arrose le repas d'un thé au massala bien chaud, à 900 roupies la Thermos contre 400 en moyenne plus bas en vallée, que je sucre abondamment. Demain, on a décidé d'être plus raisonnable et de dormir à Dragniak (4700 m) avant, le surlendemain de passer le Cho La, col situé à 5368 m, puis de marcher sur un glacier au début de la descente. On espère ainsi être plus à l'aise dans ce col réputé difficile (même aux dires de Marko!). Après le diner, on traine un peu, devant un bon feu alimenté, comme partout en altitude, là où il n'y a pas d'arbres, par de la bouse de yack. Puis on gagne notre "glacière" pour la nuit, après que j'aie demandé une 3ème couverture!
Donc, le 25 au matin, c'est grasse matinée et étape très courte, essentiellement en descente. Soit 4.5kms en 1h50 avec 160m de D+ et 240 de D-. Pour arriver à Dragniak, on traverse un glacier impressionnant ressemblant plus à un pierrier, avec de nombreux petits lacs gelés entre lesquels nous slalomons, tout en entendant le bruit de torrents souterrains invisibles sous nos pas... Très tôt arrivés au lodge, j'installe mon panneau solaire pour recharger mon téléphone, des fois que l'on puisse avoir du réseau, ma power bank et ma montre.
Puis, on aurait pas du, mais on l'a fait: lessive dans un torrent glacial... il nous faudra, malgré le soleil, de longues minutes pour retrouver une sensation au bout des doigts, après que l'onglée ait disparu. Nous n'avions rien pu laver depuis Lungren. Après cela, on va faire une balade en direction du Cho La, sur le chemin que nous emprunterons le lendemain. Puis farniente, comme tous les soirs depuis le début du treck: écriture des notes qui me serviront à rédiger ce petit topo, lecture de quelques chapitres de "La marche dans le ciel" d'Alexandre Poussin et Sylvain Tesson( relatant les 5000 kms parcourus par les 2 auteurs dans leur traversée d'est en ouest de la chaine himalayenne...). Forts de notre manque d'énergie ressenti au Renjo La, nous prenons un diner copieux. Puis nous gagnons nos chambres. La single de Sophie est au dessus de la cuisine et la notre au dessus de la salle chauffée de la salle à manger. Aussi, il ne fait pas trop froid au coucher. Qui plus est, pour 100 roupies , je prends une couverture supplémentaire. Après un brin de toilette de l'essentiel, à la lingette, je m'endors comme un bébé.
Le 26 au matin, après une super nuit et un bon petit déjeuner, on part à 7h10 pour le Cho La. Malgré notre appréhension, la montée au col se passe bien pour tous les 3. Il fait très beau quand nous arrivons au passage... mais, même prévenu, on est surpris par le glacier sur lequel on est obligés de marcher pour basculer sur Dzongla (4830 m). Merci Marko de m'avoir incité à prendre les crampons! La descente, a, elle aussi, été bien agréable; nous permettant de croiser des troupeaux de yacks chargés, partis pour le col pour aller approvisionner Dragniak et Gokyo.
On arrive vers 13h au lodge de Dzongla après 5 h de marche pour 10kms, avec 800 m de D+ et 700 m de D-. Comme hier, on prend le temps d'une Thermos de thé au massala. En soirée, alors que l'on s'apprête à faire une nouvelle toilette de chat, Marko découvre un seau d'eau tiède dans les toilettes à la turque! Une aubaine dont on profite sans tarder. Après le dîner et avoir traîné jusqu'à ce que le feu de la grande salle tombe, on gagne notre chambre et notre très grand lit pour 3 personnes! Il fait -15 dehors et guère plus de -5 dans la pièce. Les carreaux sont recouverts de givre au matin. Je passerai là ma pire nuit... On a beaucoup discuté des itinéraires jusque là; rien n'étant figé à l'avance.
Demain, on espère, en partant tôt, aller à Gorak Shep (5140 m) et si on a encore les jambes et le souffle, après avoir posé nos sacs au lodge, nous gagnerons pour un aller et retour, le "fameux" camp de base de l'Everest(EBC à 5364 m d'altitude), but de nombreux trekers, alors qu'il y a peu de chose à voir depuis là, contrairement au panorama magnifique qui s'offre du haut du Kala Patthar (5550 m).
Lever le samedi 27 à 6 heures, petit déjeuner de pancake et confiture, nous partons vers 7h pour Gorak Shep que nous atteignons après 11.5 kms en 4h avec 570 m de D+ et 240 m de D-. En arrivant tôt, on trouve facilement un lodge... Ceux qui arrivent tard sont parfois obligés de dormir sous tente malgré le froid polaire! On mange une assiette de nouilles et on boit une Thermos d'eau chaude à l'orange; le tout à un tarif prohibitif. Les prix font plus que tripler entre Namché et Gorak Shep distants de 42 kms et points d'arrivée et de départ du marathon de l'Everest.
A 5140 m, Gorak Shep est le petit village, le plus haut situé en altitude à posséder des hébergements! Puis, comme convenu, dans la mesure où nous sommes bien, nous faisons l'aller et retour à EBC (tas de cailloux et de glace). Mais, contrairement à ce qui est communément dit, il n'y a pas de détritus qui traînent. En jouant des coudes nous réussirons à y faire une photo avec le buff de l'association Vaincre Parkinson. Ce stop and go nécessitera 2h15 de marche (comprenant un petit arrêt devant un monument érigé aux morts en conquérant l’Everest et dieu sait qu’ils ont été nombreux…)pour 6.5 kms avec 250 m de D+ et donc 250 m de D-. Le soir, le fourneau et 2 radiateurs à gaz parviennent difficilement à réchauffer la grande salle. Dans la chambre, il fait un froid de gueux. Sophie, tout juste un peu moins frileuse que moi, me passe sa couverture; ce qui nous évite de payer pour une "extra blanket", 300 roupies...
Le dimanche; journée plus cool, avec lever 7 h, petit déjeuner et départ à 8 h pour un aller retour au Kala Patthar, point le plus élevé de notre trek à 5550 m, en laissant les sacs dans la grande salle de restauration du lodge. Sophie n'est pas au mieux après cette nuit au point culminant de nos hébergements... d'autant que nous montons relativement vite: aller retour en 2h pour 4 kms avec 460 m de D+ et donc 460 m de D-. Les photos faites au sommet promettent d'être superbes. On surplombe l'EBC de plusieurs centaines de mètres; aussi, on aperçoit les tentes d'une expédition que l'on apprendra plus tard être celles d'une ascension du Pumori (7161 m) et non de l'Everest. Après le stop and go, nous récupérons nos sacs et buvons un thé, on se met en chemin en direction du retour vers Namché et d'altitudes moins élevées.
Notre destination est proche: c'est Lobuché (4910 m) que nous atteignons vers midi, après 1h30 pour 5 kms avec 100m de D+ et 300 m de D-.
Nous y trouvons un lodge sympa, même si en entrant dans la cour, on voit le chauffe eau sensé alimenter la douche, démonté et posé à terre... Marko et moi nous restaurons, alors que Sophie ne peut rien avaler. Dans l'après midi, on va repérer le départ du sentier qui mène au Kongma La (5535 m), le 5 ème col que l'on envisage de passer demain, essentiellement pour éviter la foule et les convois qui montent directement de Namché. On rentre au lodge et on y dîne, et, sans traîner, on se couche. Je commence à être fébrile et à présenter de grosses quintes de toux. La nuit, il fait un froid épouvantable. Je grelotte. Impossible de me réchauffer, malgré un sac à viande (drap de soie) dans mon duvet et 2 couvertures. Chaque fois que je me retourne, la toux me réveille. La nuit est pénible aussi pour Sophie, bien entamée physiquement par les étapes précédentes ainsi que par une toux tenace. Compte tenu de nos états de santé respectifs, Marko nous déconseille de tenter le passage du Kongma La.
Après le petit déjeuner, en ce matin du 29 octobre, notre décision est prise: nous allons descendre directement jusqu'à Dingboche (4410 m) où , il fera moins froid la nuit, ce qui nous permettra d'avoir un sommeil réparateur! Nous rejoindrons donc ce gros village qui possède plusieurs commerces (épiceries, boulangeries, pâtisseries...), en 2h45 pour 9 kms avec 100m de D+ et 650m de D-. Après nous être installé au lodge, on grimpe sur une colline du haut de laquelle on a une vue splendide sur bon nombre de 7000 et 8000 mètres. En redescendant, on s'arrête pour manger un gâteau; première douceur depuis plusieurs jours. En sortant de la pâtisserie, on constate que la brume s'est installée plus tôt que d'habitude sur les sommets et qu'elle descend rapidement en vallée, apportant de la fraîcheur. Au lodge, le feu n'est pas encore allumé dans la salle commune. On s'occupe en lisant et pour ce qui me concerne, en rédigeant mes notes sur la journée qui s'écoule. A 18h30, on dîne d'un steak de yack tout en buvant de l'eau chaude pour calmer la toux rebelle qui nous dérangera encore toute la nuit. En revanche, on négocie avec le tenancier pour obtenir une 3ème couverture chacun ce qui fait que personne n'a eu froid cette nuit là.
Mardi 30, ce matin, Sophie n'est pas au mieux. Elle a eu mal au ventre toute la nuit et des céphalées avec ce satané mal des montagnes; malgré le fait que nous soyons descendu de 600 mètres en 2 jours. Contrairement à Marko et moi, elle ne peut rien avaler au petit déjeuner... Après avoir payé notre hébergement et avoir pris de l'eau chaude pour la route, on part pour une courte étape jusqu'à Pangboche (3930 m). On y arrive vers 10h, après 7 kms parcourus en 2h avec 100 m de D+ et 400 m de D-. Tout au long de la descente, on longe un torrent furieux, né des montagnes en amont et en particulier de l'Amla Dablam (6814 m),
au camp de base (4600 m) duquel nous avions un temps envisager d'aller... Pangboche est un petit village qui possède un très ancien monastère qui abriterait les reliques du "yeti", ainsi que de nombreux chortens (monuments bouddhistes) très éprouvés par le séisme de 2015, en cours de restauration. Comme tous le long de notre chemin nous voyons de nombreuses pierres recouvertes du mantra finement gravé en relief "Om Mani Padme Hum". Ce sont les pierres à mani.
De ce monastère, on aperçoit, au loin le grand monastère de Tengboche (3860 m), perché sur une colline , où nous ne ferons que passer, demain. Le lodge dans lequel nous allons passer la nuit est agréable. C'est la 2ème nuit, depuis le début du treck, que je passerai sans avoir froid.
31 octobre: après une bonne nuit, Sophie est en forme; fatiguée, mais elle n'est plus malade. On se met en chemin à 8h30 à destination, dans un premier temps de Tengboche en continuant de longer une profonde vallée que l'on finira par traverser par un pont suspendu une première fois pour nous rendre au monastère; puis une 2ème fois pour gagner le gros village de Kumjung (3780 m) après 15 kms en 5h45 avec 650 m de D+ et 800 m de D-. De là, demain, nous gagnerons Namché. La soirée, au lodge et la tenancière sont très agréables. Le propriétaire, comme dans la quasi totalité des lodges, est ou était porteur dans le cadre d'expéditions. Celui de ce soir est parvenu 5 fois au sommet de l'Everest et son fils 7 fois. D'ailleurs, les 2 hommes sont absents actuellement pour cause d'expéditions en cours... Le repas au coin du fourneau sur lequel, comme dans tous les lodges que nous avons fréquentés, trône une énorme bouilloire, est délicieux. Nous sommes les seuls clients.
Jeudi 1er novembre. Nous prenons le petit déjeuner dans la cuisine, seule pièce chauffée à cette heure. En route pour Namché en passant par Khunde, petit village très propre, longtemps administré par le responsable du développement de la vallée de l'Everest, ami très proche d' Edmund Hillary, premier à avoir gravi l'Everest en 1953 avec le sherpa Tenzing Norjay. Nous sortons de Khundé par une "porte" dans laquelle sont insérés plusieurs moulins à prière que l'on doit contourner par la gauche et faire tourner dans le sens des aiguilles d'une montre (sens de rotation de la terre). Plus nous avançons, plus la vallée s'élargit, jusqu'à dessiner un véritable amphithéâtre dans lequel est blotti Namché, porte d'entrée du Khumbu. En ce jour de Toussaint, nous avons parcouru 5 kms en 2h avec 120 m de D+ et 400 m de D-. Dès notre arrivée, on se fait indiquer l'hôpital, pour y laisser la pharmacie "conséquente" que j'ai apportée et que je ne peux laisser à des non médecins. Ensuite, nous partons nous balader et surtout, faire des emplettes de vêtements, car slip et chaussettes exceptés, nous n'avons pas fait de lessive depuis 11 jours et on commence à sentir le fauve!!! Après avoir fait ces achats, on remonte au lodge où l'on casse notre tirelire et on se paye chacun une douche chaude à 400 roupies la douche! Le soir, on dîne de steak de yach pour Marko et Sophie qui va beaucoup mieux physiquement et de poulet pour moi.
Vendredi 2: après une nuit difficile pour Sophie et Marko qui ont eu froid, alors que mes 3 couvertures me protégeaient, nous nous rendons dans un salon de thé pour prendre un petit déjeuner (café noir et apple pie) en terrasse car le soleil a eu le temps de se lever! Puis on va au marché hebdomadaire. On assiste à l'installation des paysans, parfois venus de très loin chargés de leur production (pommes de terre, carotte, et racines diverses, choux, piments...) et des camelots qui mettent en place les marchandises qu'ils veulent vendre. Dans un local fermé, un peu à l'écart, des morceaux de viande, essentiellement de bœuf et de yach, s'échangent sans contrôle sanitaire!!! Hélas, le soleil est de moins en moins présent. Il fait même froid, ce qui nous incite à remonter au lodge. Sophie va se reposer, alors que Marko et moi allons au musée construit en l'honneur des sherpas, porteurs lors des expéditions souvent périlleuses. On traine jusqu'à la nuit le reste de cette première journée sans changer de lodge...
Samedi 3 novembre: après le petit déjeuner, on part vers 8h pour le tronçon très encombré car voie unique qui va de Namché à Lukla. On a décidé de s'arrêter aux 2/3 du chemin, à Phakding, comme à l'aller. On parcourt donc sur 15 kms, en 3h30 avec 275 m de D+ et 1075 m de D-, les mêmes montagnes russes! Arrivés à Phakding peu avant midi, le soleil est caché par de nombreux nuages. Après le déjeuner, on rentre au lodge pour une nouvelle toilette de chat... Ce qui me stresse, c'est ce temps couvert et la météo qui ne serait pas bonne pour les jours à venir. Ce qui signifie que la liaison Lukla-Katmandou sera interrompue, les avions ne pouvant voler par temps couvert. Nous apprenons d'ailleurs que seuls 2 vols ont pu être effectués ce matin. Lecture et farniente nous occuperont l'après midi et la soirée.
Dimanche 4: nous nous levons tôt pour gagner Lukla avant que troupeaux, treckers et porteurs ne se mettent en mouvement. Le temps est radieux, le soleil est au rendez vous, et le chemin de bonne qualité, plus montant que descendant est dégagé. Vers 10 heures, après 7 kms en 2h avec 400 m de D+ et 200 m de D-, on s'installe dans une chambre d'hôtel, dans lequel, pour 1000 roupies, on doit avoir 3 lits et des douches chaudes. L'eau est sensée être chauffée par des panneaux solaires; mais en raison du temps couvert de la veille, l'eau est froide. Après s'être pris le chou avec le propriétaire, on s'en va dans un autre lodge où l'on ne nous promet pas d'eau chaude, mais pour 500 roupies, on a droit à une chambre à 3 lits avec lavabo et WC privatif. Après un bon déjeuner, on traine dans Lukla, on va voir les avions décoller. C'est très impressionnant! On a l'impression qu'ils sautent dans le vide en bout de piste. Puis on confirme notre vol de demain 8h enregistrement à 7h. La météo devrait continuer d'être clémente. Les vols annulés de l'avant veille ont tous été compensés. En fin d'après midi, on va prendre un pot et manger un gâteau dans un "salon de thé"; et là, quelle n'est pas notre surprise de voir tout un alignement de différents sirops français de la marque Rieme!
Lundi 5 novembre on prend le petit déjeuner à 6h15 pour ne pas être en retard à l'aéroport; mais, comme à l'aller l'enregistrement s'avère très compliqué et long car les groupes constitués par les agences nous passent devant le nez et quand on sait qu'au maximum les avions qui font la liaison comportent 20 sièges, il faudra se montrer patient. Enfin, notre tour arrive et on décolle vers 10h30! A 11h30 on quitte l'aéroport domestique de Katmandou, on prend un taxi pour le Yellow House où nous avons laissé nos bagages avant de partir pour le treck.
Mardi 6 et jeudi 8 novembre, ce sera balade dans Katmandou, quelques achats de souvenirs et de cadeaux à offrir. Les 8, 9 et 10 novembre correspondent à la grande fête annuelle hindoue. Cette fête est mobile dans le calendrier. Les dates sont fonction du calendrier lunaire. Les commerçants décorent leur pas de porte de couleurs chatoyantes et pour certains, d’offrandes pour s’attirer les bonnes grâces des déesses pour l’année à venir… La foule est dense dans les rues. De petits orchestres jouent en plein air jusque très tard !
En revanche, le mercredi 7, nous prenons un bus pour nous rendre à Nargakot, dans le district de Bhaktapur, pour visiter un village haut perché, situé dans la vallée de Katmandou. Le panorama qui s'offre à nous depuis un chemin en corniche, est superbe, avec, au premier plan des cultures en terrasse, puis derrière, une vue sur le Langtang et enfin, la chaîne des 6000 m et plus du Rolwaling.
Le 9 novembre, on quitte le Népal, la tête pleine de souvenirs à partager, en nous promettant d'y retourner un jour!
Ci dessus, le parcours de notre périple par ce qu'il est convenu d'appeler "la haute route de l'Everest". On aura parcouru environ 160 kms avec 8200 de D+ et 7000 de D- en 54 heures et dormi au delà de 3800 mètres pendant 11 nuits...